Notes sur le Chemin (livre suite et fin) Amano
54) Bien
que nous le croyions, nous ne sommes pas les maîtres de notre destin.
Depuis toujours nous sommes convaincus que
nos actions sont les fruits de notre volonté, que le résultat est l’apogée de
nos efforts, que notre labeur doit être récompensé. Si nous étions les maîtres
de nos destinées, les meneurs de nos vies, tout ce que nous envisagerions de
faire, d’avoir ou d’être, obtiendrait l’attente escomptée, le désir souhaité et
tout le monde ferait de même pour aboutir en fin de compte à un modèle
complètement stéréotypé, défini et bien précis. Ce serait alors la création
d’un Paradis artificiel sur terre avec ses valeurs restrictives, conditionnées
par l’idéation et le conformisme. La vie elle-même ne serait qu’une attraction
répétitive et interminable, ayant toujours les mêmes idéologies, les mêmes buts
et les mêmes connaissances. L’imprévisible et l’inconnu n’auraient plus lieu
d’être, les oppositions et les contradictions non plus. Nous serions totalement
mécanisés, automatisés sous l’influence de l’identique. Nous serions tout
simplement devenus de fades clones aux yeux vidés de leur lumière naturelle.
Nous arriverions à une existence monotone dont le « soudain » ne
porterait plus le fruit de l’émerveillement instantané et de la découverte. La
diversité serait remplacée par le semblable.
Heureusement, toute cette stratégie mentale ne
correspond en rien de ce qui est réellement, et intérieurement, nous pouvons
aisément le ressentir. Rien ne nous est pleinement connu, nous ne sommes pas
certains de ce qui va se passer dans la seconde qui suit. Nous ne sommes jamais
sûrs de nous réveiller le lendemain matin. Nous comprenons à peine notre
fonctionnement vital et encore bien moins notre fonctionnement mental. Nous ne
sommes même pas conscients de ce qui nous pousse à continuer notre parcours
dans ce bas-monde sans cesse en conflit. Toutes nos convictions comme toutes
nos idées sont continuellement ballottées par le doute et l’insécurité, par le
désir d’avoir et la peur de perdre cet avoir. Nos décisions sont à la merci de
leurs contraires, et nous voyons bien que nous n’y pouvons strictement rien,
qu’il faut subir et souffrir.
En vérité Cher Compagnon, il en est ainsi
tant que nous sommes soumis égotiquement, influencés par la pensée séparative,
ne voyant aucune solution mentale pour arrêter cette condition de vie en dents
de scie. Alors, quand nous arrivons au bord de ce gouffre psychologique, quand
nous sommes confrontés à cette souffrance avilissante, nous sommes aussi
poussés ou attirés par quelque chose d’étrange, d’insoupçonné, telle une petite
lueur d’espoir qui apparaît sur le chemin et qui nous invite à la suivre.
Beaucoup renoncent à avancer vers ce couloir qui s’éclaire devant leurs pas,
tant ils sont prisonniers de l’idée ancienne et obsolète qui les ronge, les retenant
dans le labyrinthe du faux, de la confusion et de la frustration, de la peur et
du mensonge. Mais tôt ou tard, ils y viendront, au moment opportun, quand le
trop plein d’angoisse et la fatigue exagérée d’une existence dualiste et
rationnelle poindra en leur être, les poussant ainsi à la rébellion intime, à
l’introspection.
Ceux et celles qui ont l’élan nécessaire
tout comme le courage confiant de faire ce premier pas vers ce nouveau monde
inconnu mais certainement plus intime, découvrent alors une autre façon
d’appréhender la Vie ,
leur vie. Ils s’aperçoivent au cours de leur marche spirituelle, que tout ce
qu’ils chérissaient, que tout ce qu’ils croyaient ou pensaient auparavant,
n’était pas plus solide que peut l’être une bulle de savon. Ils voient alors de
plus en plus lucidement que leur remémorisation comme leur anticipation n’ont
pas plus de valeur que de la poussière sur un meuble, que tout passe
inlassablement sur leur écran mental sans aucune possibilité de garder ou de
rejeter quoi que ce soit. Peu à peu, ils comprennent que tout à sa raison
d’être, propre cause d’elle-même et que leurs jugements sur toutes choses
étaient seulement dus à l’ignorance aveugle du fait toujours présent, à la
crédulité héréditaire inculquée et à l’interprétation ou la traduction
nébuleuse individualisée. Plus avant dans ce nouvel espace intérieur, ils
constatent simplement qu’ils sont le but même de leurs propres recherches et expériences,
que rien n’a de véritable existence sans leurs témoignages conscients qui
s’affirment de plus en plus dans le quotidien. Par la même occasion, ils
constatent aussi que tous réagissent de la même manière, ni plus ni moins, qu’ils
ne sont pas autant étrangers ni différents qu’ils semblaient paraître avant
cette nouvelle approche. Qu’ils ne sont pas identiques dans leurs expressions
et leurs démarches mais tous UN dans
leurs fondements, indivisibles dans la compréhension unique de Ce qui Est.
Allant encore plus en avant dans leurs investigations intérieures, ces êtres
privilégiés reconnaissent profondément que tout est ordonné malgré les
apparences, que tout est administré selon un plan parfait sous l’édit de ce que
l’on nomme la Source
Originelle , Dieu l’Impersonnel, le Soi Universel ou la Conscience Ultime.
Et en fin de compte, que rien n’est autre que cette Source Une ou Conscience
non manifestée qui se manifeste en tout, conceptuellement, duellement, nous
révélant intuitivement que nous ne sommes pas des agissants individuels
autonomes ayant une volonté dite personnelle, mais que nous sommes aussi Cela,
participants de Cela, Volonté Unique de Cela, Un et inséparables depuis
toujours avec Cela. Ayant quitté les identifications personnalisées et les
anagogies idéalistes, nous ne pouvons qu’admettre lucidement que nous ne sommes
pas les maîtres de notre destinée. Qu’en réalité, cher compagnon, nous ne
savons strictement rien de ce qui doit suivre ou va se passer en nous comme à
l’extérieur de nous. Que chaque pas se fait inéluctablement vers l’Inconnaissable.
Que Cette Divine Energie Inconcevable psychiquement, Sait et Agit d’Elle-même
et comme bon lui semble.
L’Energie Cosmique dicte et déploie sa Loi
Universelle ou son Jeu Divin en tous comme sur toutes choses nous faisant ainsi
comprendre que tout ce processus expansif et équilibré ne peut certainement pas
être accepté ni vécu par un mental réticent limité qui limite.
55) Reste
tranquille et laisse-faire.
Ne te presse pas cher compagnon. As-tu déjà
attaché un nuage ? Détiens-tu le vent dans une boite ? As-tu déjà
tiré sur tes cheveux pour qu’ils poussent ? Toute chose naît, croît et
meurt naturellement, sans ton approbation mentale. Il en est ainsi aussi pour
ta rencontre intime. Tant que tu cherches, tant que tu désires, tant que tu
crois, l’effort est nécessaire et la difficulté aussi. Celui qui court après la
liberté, court encore. En
fait, cela n’a rien à voir avec ta véritable nature de témoin conscient
equanime. C’est toujours l’ego qui cherche, qui entreprend, qui veut, qui
bouscule et qui souhaite modifier selon ses plans ce qui ne peut l’être. Si tu
ne comprends pas que la vie se vit d’elle-même, à son propre rythme et selon
ses principes naturels et ordonnés, tu gardes à l’esprit l’impression d’être
tiraillé dans toutes les directions opposées et dualistes, ainsi que
l’impression de vivre partiellement ou petitement. Quand tu perds l’idée désuète
d’être l’agissant personnalisé ainsi que ton identification à un moi possessif
qui n’est autre qu’une façade égotique couvrant l’Etreté, tu comprends aussi que
tout est comme cela doit être. Que tu n’as aucun pouvoir réel sur quoi que ce
soit. Que tout passe inlassablement en toi et devant toi sans adhérer ni
affecter ta vraie nature. Tu acceptes alors avec une confiance claire et
sereine et quand cela est nécessaire, d’agir en conséquence. Autrement tu n’as
rien d’autre à faire que de rester tranquille, de ne plus t’encombrer d’idées déviantes
et de laisser-faire.
56) Ne t’inquiète plus.
D’où
viennent tes tourments, tes soucis ou bien tes inquiétudes ? Que
deviennent-ils quand tu dors et quand tu ris, quand tu jouis du moment
présent ? Où puisent-ils leurs forces et leurs pouvoirs de te rendre amer
et malheureux ? Sont-ils permanents ou éphémères ? Sont-ils autant
réels que tu le prétends ? Compagnon du Chemin, si tu cherches la source
de leurs influences, si tu désires du fond du cœur savoir d’où émergent ces
maux, si tu te demandes sincèrement pourquoi ils t’assaillent journellement
comme si tu souhaites vraiment les réduire à néant, alors déjà, par le seul
fait de t’interroger et de les voir au présent, ils perdent de leurs emprises
sur toi. Quand tu te rends compte que tes lunettes sont sales, que ta vision
n’est pas nette, que ce n’est pas ce que tu vois qui est entaché, mais que
c’est seulement dû aux empreintes de tes doigts sur les verres, alors tu sais
implicitement qu’un nettoyage est nécessaire. Toutes les difficultés qui
pointent dans ta vie, ne sont pas là pour rien, elles cachent en elles un moyen
efficace pour te faire poser des questions pertinentes qui ont trait à ta
compréhension intime, pour te connaître autrement qu’à l’habitude, pour
apprendre à parler et à écouter avec ton Cœur. Elles sont des leçons
gratifiantes qui t’indiquent que ton comportement, tes réactions face aux
situations sont continuellement emprunts aux doutes et au manque de confiance
en toi. Notre prison mentale est édifiée de nos doutes, de nos peurs, de notre
crédulité, de notre ignorance et de notre arrogance. Le geôlier de
cette prison factice qui réduit l’humanité en esclavage est l’ego falsificateur
de vie. Tant que nous restons sous son emprise, il nous est impossible de voir
la cage qui nous détient, qui nous limite. Le chercheur sincère, à force de
questions sur ce qui l’emprisonne et sur le moyen d’en sortir, découvre que les
barreaux qui le séparent de lui-même sont virtuels, n’ayant aucun pouvoir
véritable sur sa nature d’être libre. Il commence à voir de plus en plus
clairement que c’est lui-même sous influence qui continuait à s’emmurer
d’opinions, d’idées préconçues, de conclusions hâtives et de croyances sur
toutes choses. Qu’il faisait seulement de sa liberté une condition amère et de
sa vie offerte un véritable calvaire.
L’identification
aux influences, quelle qu’elles soient, ont fait de l’être humain une
marionnette fragile qui vivote dans le dualisme, s’asphyxiant de plus en plus
de ne pas saisir ce qui le torture et l’étouffe inlassablement. Quand tu
comprends consciemment la fonction de cette manipulation égotique, quand tu
saisis le rôle nécessaire des contradictions et des frustrations, tu comprends
aussi que tout ceci n’est pas toi. Que tout est comme cela doit être et qu’il
se passe vraiment ce qui doit se passer. Cet enseignement basé sur la Constatation du Fait
Présent, te prouve que tu es déjà là, pleinement libre et que tu entretenais
seulement l’idée imaginative de le devenir. Tu arrêtes alors l’appropriation
des sentiments duels, des idées controversantes ou contradictoires. Tu
accueilles simplement et dans la neutralité ce qui te vient comme ce qui te
quitte. Par ce constat lucide qui n’est possible qu’ici dans ton maintenant là
où tu es comme tu es, tu perds naturellement et au rythme offert, toutes tes
vaines inquiétudes.
57) Témoigne
seulement de Ce qui Est.
Que tu le veuilles ou non, que tu sois en
accord ou pas avec la situation qui se présente, quelle que soit ton opinion,
le pour ou le contre d’une idée, tu n’as pas d’autre choix que d’accueillir ou
d’accepter l’événement tel qu’il est. Que cet évènement soit bon ou mauvais,
joyeux ou pénible, etc. il ne peut être autre que duel et t’arrive toujours
dans son entier. Une pièce de monnaie se compose de deux faces, une situation
se crée par ses opposés interdépendants. Le facile prend racine dans le
difficile, le lotus dans la vase. Mentalement, nous avons l’impression de faire
un choix, de vouloir ce qui nous attire et rejeter ce qui nous dérange,
pourtant nous sommes toujours confrontés à l’opposition, au côté douloureux
comme à la souffrance qui en résulte. Malgré tous les efforts entrepris pour
contrer la difficulté, pour refuser ou repousser l’expérience pénible,
l’obstacle, ce qui blesse, nous en arrivons toujours à la même conclusion sans
autre alternative, celle de subir avec ou sans notre approbation mentale,
l’expérience qui survient dans sa totalité. Quand nous entreprenons une auto-investigation,
une introspection, une enquête sérieuse de la fonction mentale et de ses
limites afin de s’en défaire, d’en sortir, de ne plus rester sous son
influence, nous nous apercevons qu’il est impossible de contrecarrer
l’expérience duelle. Qu’il est aussi impossible de choisir le côté plaisant d’une
expérience sans son côté déplaisant. Quelle que soit la situation que nous
abordons, elle est obligatoirement suivie de son contraire, pas nécessairement
dans le même temps. Quand nous admettons pleinement que quoi qu’il advienne est
comme cela doit être, que nous n’y pouvons strictement rien selon ou d’après
nos acquis, que chaque événement est duel, complet et de passage dans notre vie
ici-bas, qu’il n’a aucun pouvoir durable ni de réalité constante, qu’il est
juste là pour notre compréhension intime, pour la reconnaissance saine de notre
valeur naturelle, alors nous vivons l’expérience qui nous advient sans
interpréter mentalement selon ou d’après et nous témoignons en conscience de
l’existence d’une seule pièce formée de ses deux faces plus ou moins utiles en
leur temps, sans choix ni affectation pour l’une d’entre-elles.
58) La souffrance naît aussi de
l’idée que l’on se fait du choix.
La vie ressemble à un carrefour nous
indiquant plusieurs voies ou directions à suivre avec l’impression que nous
possédons le choix d’emprunter n’importe laquelle, du moins celle qui nous
intéresse. L’idée du choix nous fait croire qu’une route est meilleure qu’une autre,
plus facile à parcourir, plus simple à découvrir. Le monde est duel et notre
façon de le concevoir mentalement l’est aussi. Le bas est associé au haut, le
petit au grand, le bon au mauvais, etc. Cette manière de penser et de voir nous
arrive tout droit d’une éducation passée, enregistrée par le mental depuis que
l’homme a la faculté d’associer par logique les opposés interdépendants. Rien
ne peut être nié ni rejeté dans cette façon d’appréhender et de conceptualiser
tout ce que la vie nous apporte dans l’expérience, mais est-ce le seul moyen
d’aborder, d’entreprendre ou de visualiser les choses et leurs
événements ? Tant que l’esprit est conditionné par ce fonctionnement
psychologique, tout semble naturellement duel et la soumission à cette idéation
se fait sans trop de bruit, acceptant malgré tout, que la vie est ainsi, un
pendule qui oscille sans cesse entre le bien être et le mal être. L’idée de
choix est tellement ancrée dans la psyché humaine qu’elle donne l’impression
d’être le fondement unique pour être Libre, en est-il vraiment ainsi ? Sur
la route de la vie, un déclic se présente toujours dans l’esprit de l’homme.
Est-il là ou pas pour prendre livraison de « ce » quelque chose de
différent qui vient frapper à la porte de son être ? Disons que oui pour
continuer notre propos. Seulement, ce déclic suite à un choc, une angoisse ou
un début de rébellion contre un système quel qu’il soit n’est pas sous la
direction d’un choix mais bien un élan intérieur le poussant vers une prise de
conscience, lui montrant un peu de sa crédulité face à ce monde duel auquel il
plaçait toute sa confiance et ses convictions puis qui s’effondre tel un
château de cartes sous l’effet d’un léger courant d’air. Ce courant d’air est
une aubaine pour ceux qui écoutent et perçoivent son message. Il a le pouvoir
de la remise en question de toute une vie, ouvrant des tiroirs secrets en soi,
nous révélant la supercherie de toute cette mise en scène à laquelle on portait
toute notre intention. Ce déclic souvent douloureux au début de la quête intime
est nécessaire pour comprendre notre fragilité mentale ainsi que sur tout ce
que nous pensions de l’expérience vitale. Une
simple poussière dans l’œil l’irrite, elle a le pouvoir de rendre la vision
floue. Ce quelque chose d’inédit en l’homme attend patiemment sa
découverte. Si nous constatons le leurre dans lequel nous vivotons bon gré mal
gré, acceptant et refusant sans cesse, nous découvrons aussi qu’il n’existe
aucun pouvoir de choisir selon nos attirances et que chaque événement arrive selon
son bon vouloir. On ne retient pas le vent ni on ne l’emprisonne. Le choix ne peut en aucun cas être
prédominant dans l’existence humaine, autrement tous les désirs de liberté
seraient comblés et tous les êtres humains sembleraient heureux et libres. Mais
si les hommes avaient véritablement le choix, de nouveaux conflits naîtraient. Comme
dit, les uns voudraient la pluie et les autres le beau temps selon le pays plus
ou moins aride, activant ainsi une nouvelle confrontation. Avons-nous le choix
de la date de notre naissance, de nos parents, le choix de notre pays, le choix
de notre couleur de peau, le choix d’être continuellement en bonne santé, le
choix de ne pas souffrir ni mourir, le choix des situations qui se présentent, Non. Tout ceci nous montre qu’il est
impossible à l’homme de goûter selon un choix défini la Véritable Liberté
et que la route qu’il empreinte, quelle qu’elle soit, est toujours celle qui
lui convient pour continuer sa marche vers lui-même. La souffrance naît aussi
du semblable choix. Nous souffrons du désir que nous voulons à tout prix
satisfaire, oubliant trop souvent que l’assouvissement d’un désir est la racine
d’un nouveau désir à satisfaire et cela sans fin. Nous souffrons de
l’attachement à notre petite personne adoptée et à ses possessions. Nous
souffrons de l’asservissement aux choix qui nous rend capricieux et égoïste, ne
pensant qu’à notre vie de confort et notre sécurité. Nous souffrons de cette fausse
liberté tant recherchée, qui n’est autre qu’un leurre, qu’une manipulation
égotique, qu’un idéal utopique. Nous souffrons de ce manque d’écoute intérieure
qui nous guide inlassablement vers l’Unité des Cœurs, nous dévoilant que nous
sommes toujours prisonniers de la division en soi-même, de la séparation
entretenue avec les autres et le monde réel, tout cela édifié par la semblable
idée de choix multiples que nous avons épousé, que nous avons fait nôtre par
arrogance, ignorance ou crédulité.
S’il existe un véritable choix, il est celui
de suivre le courant de la vie naturelle, d’accueillir sainement et lucidement tout
ce qu’elle nous propose.
59) Nos
certitudes sont fausses, elles sont les fruits égotiques
qui empoisonnent nos
existences.
Que savons-nous réellement du but de
l’existence. Nous supposons toujours ce que nous ne comprenons pas, nous
délibérons toujours ce que nous ne savons pas. Nous sommes prisonniers de nos
certitudes erronées et de nos croyances fictives. Nous alimentons sans cesse
notre esprit de ouï-dire, d’hypothèses et de fantasmes, d’avidité et
d’aversion, de peurs, de plaisirs éphémères, de mensonges et de souffrances.
Nous sommes complètement manipulés par le pouvoir et le vouloir, le moi et le
mien, le meilleur et le pire, le plus et le moins. Nous sommes conditionnés par
une éducation appauvrie basée sur l’ambition, la compétition, la sécurité, la
possession et la réussite matérielle. La jalousie, la tromperie et l’amertume
sont devenues les influences néfastes que nous entretenons sournoisement comme
un repas copieux que l’on cache aux yeux et au ventre d’un affamé.
Mais où tout cela nous conduit-il
véritablement et quelle en est la finalité ? Avons-nous songé un seul
instant à quoi peut rimer notre vie actuelle adoptée. Nous tentons coûte que
coûte de faire de celle-ci un historique nourri de buts méritoires
hypothétiques à atteindre. De préserver aveuglément un nom identitaire
insignifiant au travers de la descendance. Avec le temps, même un nom gravé sur une
tombe s’efface. De se faire mousser orgueilleusement par le biais d’une
brillante biographie ou d’un grand savoir. D’exister pour autrui au travers d’un
drame, d’un défi, d’un art particulier, d’une richesse matérielle ou autre
chose. De devenir en quelque sorte un savant, un ponte, un héros ou même un
démon ? Et après !
Nous sommes devenus des doctes en sciences
diverses et en philosophie, des experts intellectuels de la raison et de la
logique, des politiciens avides de pouvoir, abonnés à la promesse, des
théoriciens analytiques de la Sagesse. Nous sommes devenus des dictionnaires
ambulants, des vrp idéalistes au planning surbooké dont le temps presse. Nous
manipulons la nature, les objets, les mots et les créatures, certains et fiers
de nos découvertes comme de nos connaissances. Mais où vont les connaissances,
que deviennent-elles, une fois que nous quittons la place, que nous disparaissons
à la vue de nos semblables ? Nous avons seulement l’impression ou le
sentiment que nous laissons véritablement quelque chose derrière nous. Sommes-nous
certains qu’il en est ainsi et d’où pourrait venir cette soi-disant certitude
?
Religieusement, nous répétons
continuellement des textes sacrés, nous rabâchons des crédos et vénérons les
grands penseurs habiles tout en les canonisant. Nous philosophons sans cesse le
Message Unificateur pourtant simple et limpide de Ceux et Celles qui ont manifesté
leur Véritable Nature d’Etre Libre durant leurs expériences vitales ici-bas,
les édifiant telles des statues d’or, figées solidement sur des socles de
marbre. Nous savons inconsciemment ou même consciemment que ces Etres Vrais ne
reviendront pas nous réprimander sur les dogmatismes que nous avons faits de
leur relation naturelle avec la Vie Unitive. Nous avons fait de ces Beaux Etres
et de leur Juste Message, des sujets théosophiques ardus et d’eux, des entités
supérieures sanctifiés, surtout hors d’atteinte. Pour beaucoup de croyants, il est
malheureusement rassurant de préserver Jésus attaché sur la croix, des fois
qu’il aurait l’idée d’en descendre !!
Chers Compagnons de route, réagissons avec
justesse et lucidité à tout ce cirque mental nauséabond adopté aveuglément
et voyons par nous-mêmes ce qui est vraiment comme ce qui se passe réellement.
L’intelligence employée lucidement permet la compréhension simple de notre
véritable nature mais encore faut-il se rendre compte de l’emploi que nous en
faisons à travers l’idée que nous en avons. Voilà où nous en sommes, nous les
hommes et femmes d’aujourd’hui avec cette intelligence merveilleuse, pourtant capable
de Véritables Miracles. Nous voilà autant prisonniers et aussi crédules de
l’idée égotique ancienne que nos prédécesseurs, nourrissant encore et toujours
ce monde d’illusion où la division nous sépare de la vie simple, une et libre.
C’est notre crédulité comme nos certitudes aveugles qui entretiennent cette
fâcheuse dépendance.
L’homme d’aujourd’hui est malheureusement
comme celui d’hier, il vit encore sous l’emprise de la dépendance, il dépend de
tout et de tout le monde, il marche aveuglément dans les sillons de la
sujétion. Tout le monde souffre de cette maladie mentale chronique qui rend
l’homme automatisé, sourd et borné. Combien sont ceux qui recherchent
véritablement la racine de ce mal contagieux, l’éclipse de leur lumière
intérieure et qui ressemble fort à un tabou, une interdiction dictée par la
mémoire conditionnelle et cela depuis le début des temps. Si nous cherchons la
racine de ce mal être avec assiduité, nous sommes obligés de la trouver car nous
avons la faculté mentale pour découvrir tout ce que nous ne sommes pas. Ce
que Nous Sommes en vérité, nous ne pouvons que l’être au-delà d’un mental qui
fabule et ratiocine.
Ce mal être, cette addiction à tout ce qui
est cru n’est pas nous et ne nous appartient pas. Ce ne sont que des formes
pensées égotiques, des idées viles entretenues, des leurres enregistrés
mentalement qui nous collent à la peau et nous avilissent. Nous les avons
seulement fait nôtre comme une habitude certifiée avec la conviction que cela
ne peut être autrement. Cette conviction basée sur la fausseté de l’idée est le
piège pour tout un chacun qui croît comme une tache d’encre noire sur une
feuille blanche de papier glacé. Tant que l’on reste enchaîner à ce cirque
fictif nauséabond, nous en dépendrons, oubliant que nous avons intérieurement
la faculté juste pour découvrir la fausseté de cette mise en scène
manipulatrice et le moyen efficace d’y remédier, de s’en défaire totalement.
La seule certitude que nous ayons ici-bas,
est le fait d’être vivant, la reconnaissance indiscutable de ce sentiment de
présence nommé Je Suis qui existe
au-delà des apparences et des évènements, des expériences et de leurs multiples
conditionnements.
Réfléchissons à cela : Si l’on nous
demande individuellement : Crois-tu
en Dieu ? Notre réponse ne peut être que duelle et mentale, oui ou non. Ce qui porte à discussion philosophique controversante et à conflit.
Si par contre la demande est : Existes-tu ? La réponse ne peut–être
que Oui, non duelle, expérientielle, factuelle. Alors ce simple Oui devient une
certitude vivante et une preuve tangible d’où nous pouvons entamer une enquête
sérieuse nous concernant et certaine d’atteindre un résultat probant du Qui
ou Que suis Je ?
Le Je Suis ou sentiment de présence sans nom
et sans âge précède et témoigne de toute apparition comme de toute disparition.
Sans ce Je Suis qui se vit continuellement ici et maintenant, tout le
reste : croyances, dépendances, conceptions et connaissances multiples de
tous bords n’ont pas lieu d’être.
60) Les
peurs nous empêchent d’être Nous-mêmes.
Quelles sont ces peurs ancrées qui empêchent
l’être humain de vivre simplement Ce qu’il est, d’être réellement Lui-même, là
où il est ? Quelles sont ces peurs qui masquent la faculté de voir ce qui
cloche en nous pour y mettre un terme et qui à force d’assauts nous rendent de
plus en plus serviles et abrutis ? Beaucoup de questions se posent autour
du sujet et les réponses qui peuvent aider ne sont pas toujours retenues ni
vraiment comprises. Elles sont souvent prises en compte pour philosopher ou
remplir notre caddie mental et non pour essayer de découvrir la racine de ce
mal être qui nous ronge et le moyen juste de s’en libérer. De quoi avons-nous
réellement peur ? Avons-nous peur de l’autre ? Se référant toujours
au connu, avons-nous peur de l’inconnu ? Avons-nous peur de nous connaître
tels que nous sommes en réalité ? Avons-nous peur de perdre quelque
chose que nous pensons nôtre ? Avons-nous peur de la mort comme de la
disparition de ce fastidieux moi entretenu et souvent adulé par ignorance ? En
quelque sorte toutes ces peurs enregistrées mentalement sont en soi-même,
reliées entre-elles. Chaque être humain a peur de l’idée qu’il se fait de l’autre,
de lui-même, de l’inconnu, de ce qu’il croit perdre comme acquis et de la mort
définitive de ce moi personnalisé.
-La peur de l’autre équivaut à penser que
nous sommes tous des individus séparés et biens différents, agissant selon nos
propres conceptions, nos propres opinions comme nos propres conclusions,
éloignant ainsi une éventuelle reconnaissance de l’unité qui relie chacun,
chacune au-delà de l’idée de séparation. L’autre est relation naturelle et
intime avec soi-même. L’autre est un soi-même sous une autre configuration de la Conscience Ultime.
L’autre est un stimulant nécessaire pour se découvrir et grandir ensemble.
L’autre que je rejette constamment est une
partie de moi que je n’ai pas clarifiée, acceptée, reconnue ou comprise.
L’autre est le reflet de ma personnalité, de ses hauts et de ses bas, de ma
perfection comme de mes imperfections. L’autre est moi-même et je suis lui en
tant qu’autre mais si je ne suis pas là, qui le précède pour confirmer sa
présence et lui la mienne dans son propre espace, où sommes-nous, que
devenons-nous et quel sens peut-on donner à tout ceci ? À méditer !
-La peur de l’inconnu se maintient par
l’idée de perdre le connu, les références, les croyances, les acquis, les possessions, les buts et les
conditions que l’on instaure à des fins personnelles. Ceci ne peut que
délimiter le parcours de l’entité dans son expression et dans sa rencontre
intime hors conceptualisation. Ne se connaissant pas lui-même au-delà des idées
enregistrées qu’il entretient sur lui-même, l’être humain se réfère sans cesse à
ce qu’il connaît d’après on-dit hypothétique et ce savoir accumulé dans la
mémoire le sécurise, le protège et le conduit inévitablement à garder ses
bornes limitatives et ses croyances farfelues.
La peur de l’inconnu m’incite à préserver
bec et ongles tout ce que je crois être vrai et mien, me faisant perdre ainsi
le goût frais de l’inattendu, de l’inconnaissable, de l’imprévisible et de la
spontanéité naturelle.
-L’homme
a peur de lui-même tout bonnement par ignorance de lui-même. L’homme ne se connaît pas par peur de se
connaître. Cette peur enregistrée suit son cours à travers les âges,
colportant son influence néfaste dans l’innocence nouvelle, nos enfants. Cette
peur est malheureusement ancrée en l’homme comme les veines dans sa chair. Il a
peur de se connaître, tout simplement parce qu’il a adopté une idée fallacieuse
le concernant, le poussant sans cesse à rechercher et à devenir un autre que
lui-même, meilleur ou pire, supérieur ou inférieur à certains et à ce qu’il
pense être ou croit être. Il a peur de lui-même dès qu’il commence à douter
sérieusement de ses propres capacités, de ses propres facultés. Il perd souvent
confiance en lui dès qu’il se pense prisonnier de son entourage formé dans le
moule répétitif en quête d’espoir fictif pour un avenir dit assuré. L’homme a
peur de lui-même quand la comparaison critique ou le jugement personnel non
fondé sur toutes choses et sur autrui prennent les rênes de sa vie, l’enfermant
ainsi dans le carcan de la dépendance et de la jalousie, de la fausse
responsabilité et l’ignoble culpabilité, de l’envie et de la haine.
La
peur de me connaître pleinement, libre de ce que je ne suis pas, vient d’une
malperception adoptée, d’une confusion d’esprit et d’une interprétation erronée
à l’encontre de Ce que je Suis comme de Ce qui Est.
-L’impression
de perdre quelque chose, son identité, ses acquis, ses biens ou de croire qu’il
est indispensable de changer totalement son mode de vie est un frein à la
découverte naturelle de soi-même. Tout ce cirque mental sordide et déviant de la Réalité , vu dans son
contexte véritable n’a pas plus de réalité qu’en ont les rêves. Au début, quand
la recherche spirituelle bat son plein, de nouvelles compréhensions se font
jour en soi et cela nous rend heureux, perspicaces, euphoriques, avides même.
Nous avons le sentiment adopté qu’un plus de connaissances ou de savoirs dans
les domaines de l’esprit sont les conditions nécessaires pour trouver le
bonheur durable ainsi que le moyen indispensable de se faire une bonne place au
soleil spirituel. L’homme de par ses appropriations exagérées, ses futiles croyances,
s’imagine que sa propre connaissance est due à ses multiples expériences, à sa
volonté d’être selon, d’avoir et de faire. Il croit aussi que les choses lui
appartiennent de droit puisqu’il a fait des efforts considérables pour se les
procurer, les faire siennes. Dès que la quête véritable pointe en lui, lui
démontrant qu’il ne peut pas amener ses possessions psychologiques comme
matérielles, il perd pied. Dès qu’il saisit qui lui faut se défaire par non
attachement, acceptation du fait ou abandon de ce qui n’est pas, du palmarès, du
savoir, de l’éducation raisonnée ou logique intellectuelle, il perd pied. Dès
qu’il admet que cette quête intime ne sera jamais le fruit désiré de son
imagination, de son attente, une certaine peur de perdre ses avoirs, ses
acquisitions, remonte à la surface de son esprit, croyant qui lui ait demandé
un renoncement total à ses possessions, de vivre dans une nudité inconfortable.
Il
ne s’agit pas de tout rejeter ou de tout détruire pour être soi-même et libre
de l’être mais de comprendre seulement le sens abusif de l’idée d’attachement afin
de ne plus rester sous son emprise. Sers-toi de tout ce que la vie t’offre sans
pour autant le thésauriser. Tant que le chercheur ne s’est pas lui-même totalement
mis en question, l’insatisfaction, la confusion et la frustration lui tiennent
le pas, pour l’unique raison qu’il est impossible au mental influencé
égotiquement de Voir Directement Ce qui Est, impossible de posséder ce qui ne
peut lui appartenir ni impossible de Reconnaître véritablement Ce qui n’est pas
de sa compétence.
-Avoir
peur de la mort alors que nous ne faisons que mourir de l’instant à l’autre.
Sur le plan mental, le mot mort lui-même fait frissonner tout l’être jusqu’à en
perdre ses propres moyens. Depuis toujours cette peur enregistrée mentalement
tient le pas à l’être humain, elle lui signale une disparition, une
fragmentation, une déchirure, une séparation, le est-ce qu’il y a une survivance
après corps ? Il est certain que la disparition d’un être cher est
douloureuse émotionnellement mais ce n’est pas le propos. La peur de perdre ce
fameux moi si bien organisé, si bien sécurisé, si bien conforté, fait de la
mort une finalité, une terminaison effroyable de cette personnalité
sentimentale appréciée. Mentalement, l’homme a mis en place des croyances en
d’autres mondes plus beaux, plus accueillants, plus libres de manière à faire
passer un peu mieux la pilule. Il a créé des rituels de toutes sortes pour
apaiser les esprits, pour alléger ce dénouement qui semble inéluctable. L’homme
pensant à peur de ne pas renaître, de ne pas continuer à vivre même si dans
cette configuration vitale en ce monde du nom et de la forme, tout ne fut que
déceptions, souffrances et déboires. Scientifiquement, l’homme tente de
repousser l’échéance, de contrecarrer l’inévitable en cherchant des potions
magiques, des chirurgies plastiques et autres, capables de retarder le
vieillissement mais il sait que malgré tout ceci, rien n’évitera la camarde
d’être à l’heure dite et d’y tenir son rôle de moissonneuse d’âmes. Tant
qu’il y a identification à ce moi-je-mien temporel et tout ce qui le colore,
l’homme ne vit pas réellement, il n’est qu’un zombie qui tente de subsister
tant bien que mal. L’homme se demande s’il y a survivance, s’il
continuera sa route dans d’autres plans de conscience après avoir quitté
cette enveloppe charnelle temporelle ? Pour rassurer beaucoup de curieux sur le
sujet et pour l’avoir rencontré plusieurs fois sur le parcours, je peux
seulement dire que la mort n’existe pas plus que des cheveux sans tête. La mort
comme la peur qu’elle engendre dans l’esprit est l’ultime illusion dont il faut
impérativement se défaire car elle pose de nombreux troubles mentaux déviants
qui empêchent le déroulement ou le processus naturel dans la prise de
conscience de la Vie Infinie en Soi. Nous Sommes tous les Porteurs de Vie, non
séparés de la Totalité Existentielle. Seule la Vie Energie existe dans son
infinité et le changement de vêtement du plus grossier au subtil fait
simplement parti de son jeu éternel pour sa Sublime Représentation.
Toutes
ces mises en scène théâtrales et dramatiques nourries de peurs psychiques puisent
leurs ingrédients malsains dans la marmite égotique. L’ego a peur de sa propre
mort comme il a peur de tout, alors il fait tout pour s’en détourner et créer
des substituts. L’ego nourrit la vie d’illusions, d’espérances, de croyances et
de références bancales, de façon à continuer à mener la barque de l’existence.
Si nous adhérons à son système frauduleux, nous mourrons mentalement dans l’œuf
sans avoir vécu pleinement ce qui nous est donné à vivre. Pour celui qui
s’interroge sur tout cela, qui doute ou qui se rebelle intérieurement contre ce
système inculqué, une nouvelle version de la vie, de sa vie réelle s’amorce. Il
découvre le leurre édicté égotiquement et s’en retire tout simplement. Il
comprend que la mort n’est pas autre qu’un jalon de la vie expansive,
nécessaire à celle-ci. Qu’une graine se doit de mourir pour que la fleur puisse
naître ou que la chenille se doit un retrait naturel pour laisser la place au
papillon. Il découvre de par son expérience lucide, que chaque seconde est
confrontée à la disparition pour que la seconde qui vient puisse vivre son
temps imparti et cela continuellement. Qu’il naît et meurt à chaque instant d’un
mouvement de paupière à l’autre, que chaque souffle expiré et le signe avant-coureur
d’un souffle à inspirer. Il reconnaît que chaque moment vital est frais, neuf
et que pour que celui-ci soit perçu et reconnu pour tel, il est indispensable
que l’ancien moment s’efface tout naturellement et ainsi de suite. Qu’un
battement du cœur est l’annonce du prochain. Il saisit avec clarté que la
véritable mort s’il en est une, est celle de son ego falsificateur de vie et
ses fades illusions. Il reconnaît qu’il n’est là réellement qu’en étant Pleinement
Vivant et cela tout le temps, à chaque souffle et qu’il continuera cette
respiration vitale même au-delà de cet espace-temps conditionné. Qu’il n’est en
ce monde de la forme que pour jouir sainement de son ici et maintenant offert
divinement et le répandre sans fin tel un parfum suave. L’homme qui vit
lucidement chaque instant comme étant le seul, ne peut connaître la mort, ne
peut voir de séparation ni ne peut ressentir de la peur, Il est le Sceau de
l’Intemporalité comme de l’Impersonnalité Unitive. Etre réellement vivant, c’est
savoir mourir à chaque instant.
61) Soyons simplement Nous-mêmes
au-delà de toutes peurs.
Tant
que nos esprits restent soumis à ces fausses idées de peurs adoptées qui
brisent le sens naturel de nos existences, nous ne serons pas réellement
nous-mêmes. Nous resterons les marionnettes ou les pions fragiles d’un jeu
égotique qui a pour seul dessein de tout réduire à sa mesure, détruisant de ci
de là toutes les valeurs réelles, jouant avec les êtres vivants comme un enfant
joue avec ses soldats de plomb. Nous savons que nous ne sommes pas des jouets
et pourtant nous réagissons comme tels. Arrêtons seulement de croire que nous
sommes comme ceci ou comme cela, qu’il nous faut être comme celui-ci ou
celle-là, d’après référence et ouï-dire. Arrêtons ce tourment intérieur
séparatif d’avec l’autre qui déchire continuellement l’unité de nos cœurs.
Arrêtons ce continuum psychologique bancale basé sur le connu possessif qui
apeure, fait souffrir et nous éloigne de plus en plus de l’inconnu, l’inattendu
et l’imprévisible qui sont la source régénératrice de tout ce qui Est.
Servons-nous lucidement de toute cette énergie pure falsifiée par le fantôme
égotique pour nous découvrir et nous reconnaître en tant que Présence libre en
deçà de toute cette mise en scène chaotique. Il n’y a qu’une Energie mise à notre
disposition, elle est malléable comme de l’argile, prenant l’aspect souhaité.
Cette Energie est aussi utilisable pour nous élever sereinement au-delà du
marasme égotique et de toutes ses confusions illusoires.
Etre
simplement soi-même ne demande aucun besoin, aucun effort, aucun sacrifice,
aucune ascèse car nous sommes déjà Cela avant, pendant et après quoi que ce
soit. À nous de nous en rendre compte lucidement jusqu’à nous en convaincre pour
remédier une fois pour toute à ces viles idées prises pour vraies.
Il
n’y a vraiment Rien de plus Simple que d’être soi-même. Il y a rien de plus
simple que de reconnaître en toute quiétude que nous sommes toujours là, se
vivant simplement là où nous sommes tels que nous sommes, mais la vie comme on
la connaît psychologiquement ne peut nous le faire admettre tant il y a de
complexités mentalisées emmagasinées dans l’esprit. Des questions peuvent
surgir en nos esprits : Comment
se libérer de cette idée possessive enregistrée inconsciemment, de la
dépendance qui apeure ? Comment réduire à néant ces malperceptions afin de
retrouver la tranquillité et l’équilibre ? Bien que pour le mental infecté
cela reste quasiment impossible, en réalité, il n’y a rien de plus facile pour
un mental conciliant et à l’écoute. Si nous accueillons sincèrement le fait
qu’il est possible de se connaître avec justesse par la guidance intérieure, si
nous désirons ardemment changer nos fausses perceptions, nous découvrons au fur
et à mesure de notre Avancée intime que rien ne nous appartient de droit, que
rien ne peut être nôtre mais que tout contribue à nos existences. Le Maître
Conscience dit : Le vrai
renoncement au monde n’empêche pas une vie prospère, les biens matériels ne sont
pas une entrave à notre quête intérieure. Le renoncement véritable concerne seulement le rejet lucide de sa
propre perception faussée mentalement. Nous comprenons alors que nous ne
sommes pas de ce monde gouverné par l’ego. Que nous ne sommes pas ce que nous
avions cru être ni ce que nous voudrions être selon ou d’après. Nous réalisons
dans le même temps que tous ces savoirs ou connaissances utiles au début de la
démarche vers soi-même ne sont plus nécessaires pour une vie saine, pleine,
joyeuse et heureuse. Nous réalisons sans affect que la peur elle-même vient
tout droit d’une source insignifiante et déviante de l’Unité. Ce qui fait que
cette peur vue dans son contexte, s’évanouit d’elle-même sans autre forme de
procès. Nous réalisons alors et sans le moindre doute que hier comme demain
n’ont aucune existence propre ni durable, que tout se vit réellement ici dans
le maintenant. Nous témoignons aussi que de nous-mêmes en tant que personne
imaginée nous n’agissons pas, nous ne vivons pas, nous n’existons pas, que
toute cette aventure humaine pas toujours agréable n’est que l’expression
désirée par la Conscience Ultime
pour sa propre expansion. De par cette nouvelle compréhension qui réveille nos
cœurs et nos esprits à l’Amour Intemporel, de par ce témoignage neutre et
conscient qui nous convie à être seulement présent à soi-même et cela à chaque
instant, de par cette nouvelle découverte qui nous invite à Voir autrement sans
pour autant changer sa vie actuelle, sans se soucier ni dépendre de ce qui ne
fait que passer, nous reconnaissons simplement et dans cette pure évidence
d’être, que tout est ce qui doit être et qu’en vérité, Tout est bien.
62) Aime ce que tu fais, fais ce
que tu aimes.
L’action
et l’homme ne sont pas séparables ni ne sont différents, les deux sont unis
comme la vague l’est à l’océan. Même
dans ce que l’on appelle l’inaction il y a l’action de ne pas faire dit le Maharaj.
La vie nous invite continuellement à l’action et à la découverte, jusqu’au jour
où la passion intervient dans notre espace vital. Faire ce que l’on aime.
Cette passion est semblable à un fil d’équilibriste tendu entre deux rives.
D’un côté de ce fil, cette passion a le pouvoir d’amener l’entité humaine à
l’idée d’attachement, à l’idée d’être l’auteur et le propriétaire de cette
passion. Elle aboutit presque toujours à l’isolement, à l’enfermement égotiste,
réduisant ainsi la venue de l’énergie nécessaire pour l’expansion créative.
Cette passion limitative est le guide de la frustration et de la confusion.
L’autre côté de ce fil détient le pouvoir immense de conduire l’être humain à
la compréhension du rôle de l’énergie illimitée qui s’active aussi au travers
de la passion. Par sa croissance en l’homme, cette passion le délivre de l’idée
d’être l’agissant personnifié ou l’actionnaire. Elle lui apprend à devenir un
intermédiaire, un instrument ou canal vivant, un témoin conscient qui reçoit et
transforme l’impulsion de l’énergie, en acte. Cette passion est intuitive et
invite constamment l’homme à l’acceptation totale d’aimer ce qu’il fait et de
faire ce qu’il aime sans l’attachement possessif au dénouement de l’acte, sans
l’attente préméditée d’un résultat glorieux ou d’une satisfaction individuelle
orgueilleuse.
63) Aime ton prochain comme
toi-même.
Cette
grande pensée unitive formulée par Jésus
le Vivant a fait et fait toujours couler beaucoup d’encre ainsi que
beaucoup de sang par les croyants comme par les incroyants, attaquant et
défendant un point de vue qui au bout du compte est hypothétique, insignifiant.
L’homme ne peut saisir mentalement l’Amour Véritable, cette faculté innée et
naturelle en lui tant qu’il reste cloisonné dans les croyances séparatives qui
sélectionnent les uns tout en rejetant les autres. Aimer l’autre comme soi-même
reste impossible tant que l’on garde à l’esprit l’idée d’évaluation, l’idée de
particularité, l’idée de possessivité comme l’idée d’appartenance. Quand nous
comprenons lucidement le sens de l’Amour Véritable qui relie chacun comme un
Seul Etre, La Reliance Unitive, nous
découvrons qu’il ne peut y avoir aucune différence entre les autres et soi. Pas
de supérieur ni d’inférieur, pas de dominant ni de dominé mais juste des
interprétations faussées sur le sujet. Nous reconnaissons alors et sans l’ombre
du doute que Nous Sommes tous UN, issus de la même Source Nouménale. Que tous
les êtres humains comme toutes autres créatures biologiques sous des millions
de configurations sont en vérité, une seule manifestation pleine et entière de la Conscience Ultime
pour sa propre expansion.
64) Aime-toi pour aimer ton
prochain.
Aime-toi
pour aimer ton prochain. Révise ton passé sans te troubler puis expie par un
témoignage conscient tes erreurs par le pardon, nous enseigne le Maître
Intérieur.
S’aimer
soi-même peut nous sembler ardu, égoïste même, tant nous avons adopté
aveuglément les croyances séparatives qui soumettent, mesurent, jugent ou pèsent
les uns, les autres selon des références adoptées sans grandes significations
dans le Cœur Divin où seule règne l’Unification Expansive. Si nous laissons derrière
soi toute cette manigance imposée qui provient d’une mémoire historique
infectée égotiquement, nous nous apercevons qu’il n’y a rien de plus simple et
de plus naturel que de s’accorder une véritable attention, une affection saine
dépourvue d’intérêt égoïste. L’amour sain ou l’appréciation juste envers
soi-même ne particularise pas, ne sépare pas et n’a rien à voir avec une estime
individualisée de soi, influencée par la pensée fragmentaire qui porte l’esprit
à croire à l’identification psychocorporelle temporelle limitée qui limite. Cet
Amour reconnu nouvellement et intérieurement pour ce qu’il est, s’étend au-delà
des contrées mentales apprivoisées, nous englobant tous totalement, nous
unissant tous à Ce qui Est.
Révise
ton passé sans te troubler
signifie que ce qui fut vécu en son temps ne peut se revivre dans le maintenant
mais qu’il est parfois nécessaire de revoir au présent ce passé blessant sans
s’y impliquer psychiquement, s’y laisser embarquer ou encore s’y perdre. Ce qui
autrefois, affecter intérieurement l’esprit n’existe plus réellement
aujourd’hui et vu lucidement au présent inconditionné, ce hier périmé se classe
sans encombre et aussitôt dans la bibliothèque mémorielle de manière à ne plus
retarder l’avancée intime ni contraindre lourdement l’actuel. L’expiation est « le défaire » de ce qui n’est plus
que souvenir, elle est régulièrement accompagnée du pardon. Le pardon est
l’acceptation pleine du vécu dans la reconnaissance et le soulagement que
c’était seulement ainsi au moment proposé.
Expier
n’est pas se racheter comme souvent énuméré par le penseur ignorant et crédule.
Expier c’est se Défaire lucidement de l’intention de la faute puis pardonner simplement
l’idée frauduleuse de l’avoir préservée.
65) L’amour
mental n’est qu’un jeu égotique qui blesse.
L’Amour qui blesse n’est pas de
l’Amour.
Dans ce monde mentalisé, personne ne peut
s’aimer ni aimer quiconque véritablement sans intention, sans intérêt. L’amour
pour soi sur ce plan limitatif est une prison édifiée par l’ego qui engendre la
division et la séparation entre les êtres. L’amour vrai n’existe pas quand il est
limité à l’individu, quand nous attendons consciemment ou inconsciemment
quelque chose de l’autre. L’amour mental est toujours qualifié de valeur
discriminante, il est considéré d’après nos croyances, ou désiré selon nos
références. Ces grands mots Amour, Dieu, Liberté, Egalité, Vérité, Réalité,
Paix ont perdu le véritable sens Unitif dans l’ignorance et l’égoïsme de ceux
qui les emploient à tort et à travers, qui les mettent à toutes les sauces
duelles à des fins personnelles. Tel un placebo, cet amour restrictif remplace
ce que l’on ne peut reconnaître mentalement. L’amour mental est synonyme
d’affection dualiste, de commisération, d’un yo-yo qui oscille entre les hauts
et les bas, les plaisirs et les souffrances bien souvent jusqu’à la haine,
l’amour amer. Cet amour est devenu l’idéal affectif qui nous fait croire à la
personnalité sentimentale, à la valeur morale et à l’importance égocentrique
donnée à soi-même et aux autres. Il pousse souvent l’entité humaine à la quête
d’un désir, d’une récompense, à la recherche d’une terre promise bien méritée,
à un éden sélectif et artificiel. Cet amour égotique n’est qu’un leurre, qu’un
appât émotionnel d’attachement qui fait de l’être humain un pantin fragile,
tiraillé par les fils de la peine comme de la joie, des rires et des pleurs
éphémères. Cet amour sentimental engendre la jalousie, la possessivité, la
dépendance, l’envie, la passion sélective, la haine et l’orgueil. Il n’est
qu’un poison de plus qui attriste l’humanité, la faisant se renfermer sur elle-même.
Ce faux amour employé ésotériquement, spirituellement est un piège très dangereux,
le plus dangereux de tous. C’est un collet qui détient de la nourriture
spirituelle intoxiquée qui semble belle et fraîche, juste pour attirer et
endoctriner l’esprit des faibles afin de les perdre dans les convictions
élitistes, réduisant ainsi leur champ de liberté naturelle et d’action juste
afin d’augmenter leur dépendance. Cet amour illusoire est une drogue égotique au
goût sucré qui rend l’esprit addictif, contradictoire, opiniâtre,
contestataire, colorant la vie d’oppositions et de choix fictifs entre le bien
et le mal, le oui et le non, l’avidité et la répulsion. Cet amour conditionnel
ne peut être comparé à l’Amour Réel dont toutes les définitions verbales ne
sont que des indications vides de sens, des significations réductrices de ce
qui est hors mental, non mental.
66) Le
seul rôle de cet amour sentimental est d’amener l’entité humaine
vers l’Amour
non mental.
Tous les sentiments profonds qui ennoblissent
l’esprit et font frémir l’être spontanément sont les fruits doux de l’Amour
Vrai qui viennent tout droit de la Source Originelle , le Cœur-Centre. Ce fluide impersonnel et intemporel, cette
effluve innommable est l’essence purifiée qui alimente le moteur de
l’existence, du récepteur au transmetteur, du don au reçu, du reçu au don et
cela sans fin. Osho dit : L’amour reçu est l’écho de l’amour
donné. Et Maharaj à un disciple qui se demandait si
c’était bien de lui faire une offrande, dit : L’amour qui vous le fit
offrir me le fera accepter.
Le seul handicap à ce courant d’énergie inaltérable est l’appropriation.
Essayer de le faire sien court-circuite la réception et la transmission naturelle
de ce sentiment noble et bien réel. Rien
ne nous appartient et tout est au service de la reconnaissance du Soi
Universel. Si nous limitons l’Amour reçu à un proche, une passion, un
objet ou autre chose, il devient un amour-désir, un amour particularisé et nous
en perdons toute la saveur, toute la fraîcheur, toute la délicatesse. Une fois
ce désir épuisé, nous le rechercherons partout ailleurs, encore et encore et cela
sans cesse. Quand nous comprenons cet
amour-désir avec ses décrets dualistes qui réduisent l’entité humaine à un moi
possessif, un Je égoïste, nous avons aussi la faculté de reconnaître que rien
ne peut soustraire, diviser ou conditionner l’Amour Réel. L’Amour réel est la
quintessence même de la Totalité, un synonyme d’Absolu, d’Energie Pure, de
Souffle Vital ou de Conscience Ultime.
67) L’Amour
Réel ne se conçoit pas, il se découvre simplement dans l’acte à faire
le bien
sans intention particulière.
Pour un esprit calme et conciliant
reconnaissant sa Source, pour un cœur joyeux et accueillant, ouvert au Fluide Divin,
l’Amour réel se concrétise par le don de soi, par l’acte de faire le bien
autour de soi, être solidaire envers tous sans intention particulière. Rendre
naturellement heureux ne se peut que par l’écoute et la compassion naturelles. Etre
heureux c’est cultiver la faculté saine de rendre heureux. La Bonté , l’Altruisme ou
l’Entraide d’Amour s’offre sans retenue et se révèle sans intention dans un
regard compatissant, un sourire bienveillant, une action désintéressée, une
main tendue, une empathie authentique, une écoute sereine et attentive.
La fleur de l’Amour Réel est la Compassion , son fruit
est le Partage.
68) L’Amour
Réel est hors mental, en deçà d’une compréhension intellectuelle.
Comment définir l’indéfinissable ? Comment
émettre une opinion, un terme juste, un sens verbal là où il n’y en a pas.
Comment concevoir mentalement ou intellectuellement l’Infinitude, l’Eternel, l’Absolu ?
Nous sommes incapables de l’expliquer, incapables même de le comprendre,
seulement aptes à l’accueillir, encore faut-il être Là, dans la Présence à
soi-même pour le re-connaître et le recevoir. C’est là que réside notre
compréhension vitale, notre sens véritable d’Etre. Si nous pouvions définir cet
Amour hors de la portée mentale, nous en parlerions sûrement par l’élimination
de tout ce qu’il n’est pas. Cet Amour réel n’est pas ce que l’on croit ni ce
que l’on pense. Il n’est pas nommable ni reconnaissable. Il n’est pas
conceptuel ni limitatif. Il n’est pas personnel ni démonstratif. Il n’est pas
évolutif ni représentatif. Il n’est pas scientifique ni philosophique. Il n’est
pas expérientiel ni le fait d’une quelconque résultante.
Si nous avions l’autorisation et la faculté
juste de dire ce qu’Il Est, on pourrait seulement murmurer avec la plus humble
des attitudes et le plus profond respect, que l’Amour Réel est tout ce qui
permet Cela et sûrement beaucoup plus encore…
Dieu est Amour, le Souffle de Vie en l’UN.
**********
Namasté. (Petite
histoire)
Un grand érudit occidental,
bercé dans de nombreuses sciences, philosophies et religions s’était mis en
tête de rencontrer un Grand Maître de Sagesse venant des Indes, capable de
reconnaître son savoir, et peut être, partager avec lui quelques points de vue
qui remédieraient sur le monde en souffrance d’aujourd’hui.
Un de ses amis lui avait
suggéré d’aller rendre visite à un ermite de renom qui vivait au fin fond de la
chaîne himalayenne. Pris d’une grande curiosité et d’un courage à toutes
épreuves, notre compagnon prépara son sac de voyage et n’oublia pas d’y inclure
quelques gros livres importants et lourds de savoirs étudiés lors de ses
recherches. Il prit l’avion, puis le bateau, le train et enfin le taxi qui le
déposa à l’adresse indiquée, c’est-à-dire au pied d’un immense édifice rocailleux,
structuré d’au moins mille marches plus ou moins escarpées.
Tout près, un jeune enfant vêtu
de blanc lançait une balle contre la base de l’édifice. Notre homme s’adressa à
lui pour demander où pouvait résider ce fameux Maître. L’enfant sans aucun mot,
le sourire aux lèvres et le regard profond lui indiqua spontanément du doigt le
sommet du monument pierreux puis continua son jeu.
Notre chercheur fit un recul
pour s’apercevoir de l’énorme effort à faire pour atteindre le but. Le soleil
et sa chaleur étaient de la fête. Bien qu’hésitant, il se dit qu’il avait déjà
fait un très long trajet pour arriver jusqu’ici et que malgré tout, il ne
renoncerait certainement pas à gravir cet échafaudage de pierres. Le voilà
parti.
Les trois cent premières marches
furent franchies d’un pas plus ou moins alerte et sans trop de mal, notre
bonhomme rumina les questions essentielles à poser au Sage, préparant son
élocution, imaginant cette belle rencontre. Un peu essoufflé, Il fit une petite
halte et laissa sur une des marches quelques ustensiles encombrants qui ne lui
semblaient pas bien nécessaire pour la suite de son périple, puis il repartit.
Durant les trois cent
nouvelles marches, il commençait à douter sérieusement de ce parcours pénible
et rocailleux. Il doutait de ce Maître inaccessible, de ses proches qui
l’avaient encouragé, se disant que c’était peut-être pour se moquer de lui. Il
doutait de ses connaissances qui ne lui étaient d’aucun secours dans ce moment
difficile. Il doutait de lui-même et de son arrogance qui l’avait mené dans
cette folle aventure. Enfin, il doutait de tout et de tout le monde. Les nerfs,
la fatigue et la chaleur accablante le poussaient à rebrousser chemin, mais en
lui, une petite voix fébrile lui soufflait de garder patience et courage afin
de continuer son ascension.
Il retira par la suite tous
les habits inutiles ainsi que sa besace contenant ses gros livres, qu’il déposa
soigneusement dans une cavité proche. Presque nu, il reprit son chemin bon gré,
mal gré. Curieusement, comme par enchantement, il aborda les trois cent autres
marches sans trop de difficultés. Au plus il montait, au moins il ressentait
l’épuisement, les marches semblaient glisser sous ses pas. Il remarqua aussi que
toutes les questions qu’il avait si longuement méditées et chéries avaient
totalement disparu de son esprit, un enthousiasme serein jusqu’alors
insoupçonné vint l’envahir, s’installant doucement mais sûrement au fur et à
mesure de son avancée.
Les quatre vingt dix dernières
marches arrivèrent sans qu’il ait trop à y penser. La dizaine de marches
restantes semblait inabordable tant elles étaient étroites, c’était quelques
pierres frêles de ci de là, posées au sol juste par complaisance. Notre ami
s’arrêta de nouveau pour constater leur fragilité, ne sachant pas s’il lui
était possible de les dépasser. Encore une fois le doute le retrouva et
l’incita à faire demi-tour, mais aussitôt la petite voix en lui de plus en plus
claire, lui dit de continuer, de ne pas se détourner de son but, ce qu’il fit
en fait, sans le moindre effort.
Peu de temps après, ses yeux
découvrirent le sommet, c’était un plateau d’un vert flamboyant pas plus grand
qu’une table ronde de trois mètres d’envergure. Son regard ne fit qu’un tour
pour s’apercevoir sans pour autant avoir d’inquiétude, qu’il n’y avait personne
qui l’attendait. Son esprit était devenu aussi vierge, aussi vide et libre que
cet espace, seule la paix régnait autant en lui qu’à l’extérieur.
Il s’assit au milieu de cette
pièce naturelle immaculée et d’un seul coup, éclata d’un rire tonitruant venant
du tréfonds de son être, qui par l’écho se répétait indéfiniment comme s’ils
étaient mille à se réjouir de ce même moment intemporel. Il leva doucement la
tête, et contempla l’immensité d’un ciel bleu profond et intense nourrit d’une
multitude d’étoiles, puis il baissa la tête et vit une mer de nuages blancs
purs qui encerclait ce grand monticule de pierres grises.
Lors de cet Instant Magique, Il
eut simplement la vision soudaine de l’enfant innocent, de son beau sourire et
de son regard franc, qu’il avait rencontré d’emblée avant sa montée périlleuse.
Il reconnu en Lui et sans la moindre hésitation, l’Ami-Enseignant tant
recherché.
Lui, nouvellement né,
n’appartenait à plus rien de concevable et pourtant tout l’imprégnait.
Ni vide ni plein, ni être ni
non être, ni absence ni présence, juste Ici, Vivant dans le Maintenant.
La non-séparation nommée aussi
Reliance, soudainement par lui comme
en lui, se révélait.
La Compréhension était Là.
Le sourire aux lèvres, le cœur
emplit d’une joie inexprimable et d’une paix vivifiante insondable, il inclina
la tête en silence puis il joignit les mains sur sa poitrine en signe de
gratitude et de profond respect, le Namasté.
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